Une vie de vache laitière
Je suis née dans un élevage intensif.
Arrachée à ma mère dès ma naissance,
Je n'ai jamais vu le jour.
Je n'ai jamais compris, je sais juste que la chaleur de ma mère m'a manqué dès les premiers instants.
Je l'ai entendu crier et j'ai crié aussi.
Un instinct primitif que tout bébé a lorsqu'il se retrouve séparé de sa génitrice.
Dès ma naissance je n'ai connu que violence et souffrance.
De ce monde, je ne sais qu'une chose : c'est un monde froid, sans aucune lumière ni espoir,
C'est un monde dépourvu d'amour ou seule la douleur règne jour après jour.
Jusqu'a l'âge de deux ans j'ai vécu dans un minuscule enclos,
Seule, au début je tétais tout ce que je trouvais à ma porté.
Puis un jour on m'a emmené ailleurs.
Je pensais que la solitude et le froid de cette vie était la pire des choses, mais j'avais tort.
Mon cauchemar a commencé à mes deux ans.
Parquée, attachée par le cou jour et nuit je n'ai jamais pu assouvir le moindre besoin naturel normalerment.
Si je bougeais trop, un homme venait me battre, ou bien un fil éléctrique m'envoyais une décharge.
Mon calvaire a commencé lors de ma première insémination artificielle.
On m'a enfoncé un objet froid dans le corps, j'avais peur et on me frappait.
12 mois plus tard, je donnais naissance à mon premier bébé,
Que l'on m'a arraché quelques heures plus tard.
Je n'ai jamais connu plus grande détresse, jamais connu plus grande souffrance.
Vous n'êtes pas les seuls à vous attacher à votre progéniture avec toute la hargne de votre corps.
J'ai crié et appelé pendant des jours, ce qui m'a vallu de nombreuses blessures liées aux coups qu'on me donnait.
Les hommes me frappaient aussi les mamelles et récuperaient chaque jour mon lait, destiné à mon petit mais qu'il n'aura jamais l'occasion de boire.
Cette souffrance n'a jamais cessée.
Pendant 4 ans j'ai vécu cette horrible vie, ou plutôt cet horrible enfer.
Chaque minute de chaque heure de chaque jour, pendant quatre longues années j'ai vécu dans la peur
Dans la douleur et l'horreur de la perte de chacun de mes petits,
Car cela n'a jamais cessé, tous les 12 mois je donnais naissance à un bébé que l'on m'enlevait immédiatement.
Le jour de ma délivrance, je ne pouvais presque plus marcher,
Mes pattes ne fonctionnait presque plus, meurtries par de multiples lésions et blessures.
On m'a fait monter dans un camion avec d'autres congénères tremblantes de peur,
Je savais que c'était la fin.
Les Hommes étaient toujours plus violents, plus hargneux.
Attachée parmis tant d'autres, j'ai attendu pendant de longues heures dans l'odeur de chair et de sang.
Enfin on m'a accompagné dans une salle froide et qui sentait la mort.
La tête en bas j'ai vu des cadavres à mes côtés, puis on m'a plongé dans un liquide qui m'a un peu étourdi.
Mais j'ai tout de même senti mon sang coulé, ma vie s'échapper dans un trou immense de souffrance.
Dans un dernier sursaut de vie j'ai repensé à mes petits, nés dans ce monde si noir et si violent.
Pendant mon court passage sur cette Terre, il n'y a pas eu un moment ou je n'ai pas souffert, de douleur, de peur, de froid, de solitude, de stresse, de détresse... J'ai vécu dans la souffrance et je suis morte dans la douleur et dans l'indifférence la plus totale, pour votre confort et votre alimentation.
Je suis une vache laitière et chacuns de mes petits sont nés dans ce monde pour votre lait.
Si on suit l'adage "on a que ce qu'on mérite", alors qu'on-t-ils fait pour mériter cela ?
Ce n'était que des bébés, des nouveaux-nés.
Ce n'était qu'une mère.